Origines et évolution du droit québécois de l’absence : de l’existence incertaine à la présomption de vie
Chaque été, le Centre Paul-André Crépeau de droit privé et comparé organise une série de séminaires afin de promouvoir les travaux de recherche des étudiantes et des étudiants de Ã山ǿ¼é et d’ailleurs. Pour cette présentation, nous accueillons Étienne Cloutier (Université de Toronto). Tout le monde est invité à y assister.
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En décembre 1964, le navire Marie-Carole, parti en mer des Îles-de-la-Madeleine pour une expédition de pêche, sombre lors d’une tempête au large du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse. Les cinq hommes à son bord, pères de dix-neuf enfants, sont alors introuvables. En plus des considérations humaines inhérentes à toutes tragédies, le naufrage du Marie-Carole soulève aussi, pour un juriste, diverses questions légales complexes. Qu’advenait-il des successions de ces cinq hommes? Et, le cas échéant, de leur mariage? Devait-on présumer les naufragés vivants, ou bien morts?
C’est à ces questions, et à bien d’autres encore, que tente de répondre le droit de l’absence. Bien que dans des contextes indéniablement moins folkloriques, il est encore aujourd’hui des instances où les dispositions relatives à l’absence, lesquelles visent, pour l’essentiel, la protection des intérêts de disparus dont l’existence est incertaine, trouvent application devant les tribunaux. Certes, ces situations sont de plus en plus rares, vu le développement effréné des technologies de communication, mais elles n’en demeurent pas moins possibles. La disparition d’une soixantaine de personnes dans le récent incendie d’une tour de logements à Londres, et d’une centaine d’autres des suites d’un éboulement dans le sud-ouest de la Chine, l’incapacité des autorités à identifier ou même à retrouver plusieurs des corps, nous le rappelle de manière tragique.
C’est face à cette éventualité que le législateur québécois, loin d’abandonner l’institution de l’absence au moment de la réforme du Code civil du Québec, a plutôt décidé de la simplifier et de la moderniser, et d’ainsi l’adapter aux réalités contemporaines.
Vu la rareté des ouvrages de droit québécois sur la question, et l’absence (!) d’écrits contemporains offrant un portrait global des origines et du développement de cette institution au Québec, il nous a semblé opportun d’ajouter notre contribution à cette discussion. Nous proposons donc d’observer les premières manifestations de cette institution en droit romain et dans l’ancien droit français, pour ensuite retracer les origines – historiques et conceptuelles – du droit québécois de l’absence, et de détailler son évolution, du Code civil du Bas-Canada jusqu’au Code civil du Québec.
Nous chercherons également, lors de cette conférence, à mettre en relief l’influence qu’a pu avoir sur l’état actuel du droit québécois le traitement dans les systèmes de droit continental – napoléonien et germanique – de cette question. Nous entendons aussi démontrer, au terme de cette discussion, que c’est devant le constat de l’impraticabilité de l’idée, propre au modèle napoléonien, du maintien de l’incertitude quant à la vie ou la mort de l’absent, qu’il l’a abandonnée au profit de celle, issue du droit germanique, selon laquelle sa vie est présumée jusqu’à ce qu’une preuve contraire soit suffisante.
Biographie
Me Étienne Cloutier est membre du Barreau du Québec depuis 2015. Après avoir obtenu son baccalauréat en droit de l’Université de Montréal, Me Étienne Cloutier a exercé pendant deux ans la fonction d’avocat-recherchiste auprès de la Cour d’appel du Québec. Il se spécialise en droit civil et administratif, et entamera à l’automne une maîtrise intensive en droit à l’Université de Toronto, avant de travailler comme clerc à la Cour d’appel fédérale pour la période 2018-2019.
Une demande d'accréditation pour 1 heure de formation continue obligatoire pour juristes a été déposée auprès d'un formateur reconnu. Aucune inscription n’est requise. Une collation sera servie. Pour plus d’informations, prière d’écrire à centre.crepeau [at] mcgill.ca