La vie secrète des matériaux
Pour la première fois, grâce à ces travaux qui ont fait l’objet d’un article publié le 24ÌýoctobreÌý2014 dans la revue spécialisée Science, des chercheurs ont pu distinguer les changements qui se produisent dans le réseau atomique d’un matériau lors du repositionnement des électrons au cours d’un processus ultrarapide. Ces observations ont été rendues possibles grâce à la mise au point, par une équipe de Ã山ǿ¼é, d’instruments pouvant être utilisés notamment par des scientifiques de diverses disciplines pour observer les transformations de courte durée, mais essentielles, qui se produisent au cours des réactions chimiques, ou par des biologistes pour comprendre la fonction des protéines à l’échelle de l’atome. Cette instrumentation ultrarapide combine de façon novatrice des outils et des techniques de la microscopie électronique et ceux de la spectroscopie laser.
«ÌýNous avons conçu des instruments et des méthodes qui nous permettent véritablement d’observer la structure microscopique de la matière, à l’échelle de la femtoseconde (un millionième de milliardième de seconde), et qui sont essentiels pour l’étude des processus dans les domaines de la chimie, de la science des matériaux, de la physique de la matière condensée et de la biologieÌý», affirme BradleyÌýSiwick, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en science des vitesses ultrarapides à l’Université Ã山ǿ¼é.
«ÌýNous pouvons observer les déplacements du noyau et distinguer ces phénomènes du comportement des électronsÌý», explique BradleyÌýSiwick, également professeur agrégé aux départements de chimie et de physique. «ÌýEn outre, nous pouvons déterminer l’impact de ces changements structurels sur les propriétés du matériau, ce qui est le plus important sur le plan technologique.Ìý»
En tirant parti de ces récentes avancées, le groupe de chercheurs a permis de jeter un nouvel éclairage sur un problème de longue date dans le domaine de la physique de la matière condensée. La transition du dioxyde de vanadium d’un semi-conducteur à un métal intrigue la communauté scientifique depuis la fin des années 1950. Ce matériau agit comme un semi-conducteur à basse température, mais se transforme en un métal hautement conducteur lorsque la température s’élève à 60ÌýdegrésÌýCelsius environÌý–Ìýce qui n’est pas beaucoup plus que la température ambiante. Cette propriété inhabituelle permet à ce matériau d’être utilisé dans un large éventail d’applications, allant des commutateurs optiques à grande vitesse aux revêtements intelligents thermosensibles pour fenêtres.
Cette expérience s’est déroulée dans le laboratoire du professeurÌýSiwick, situé au sous-sol du Pavillon de chimie de l’UniversitéÌýÃ山ǿ¼é où, en compagnie d’une équipe d’étudiants aux cycles supérieurs, il a passé près de quatre ans à édifier soigneusement un réseau de lasers, d’amplificateurs et de lentilles sur un microscope électronique spécialement adapté et à monter le tout sur une table en acier sans vibrations.
L’équipe mcgilloise a réalisé ses travaux en collaboration avec le groupe de recherche de MohamedÌýChaker, du Centre Énergie Matériaux Télécommunications de l’Institut national de recherche scientifique (INRS), un centre de recherche universitaire situé à l’extérieur de Montréal. Les scientifiques de l’INRS ont fourni les échantillons de VO2 de haute qualité et extrêmement mincesÌý–Ìýenviron 70Ìýnanomètres, ou 1Ìý000 fois plus petits que la largeur d’un cheveu humain – nécessaires pour mesurer la diffraction d’électrons ultrarapide.
Les modèles de diffraction fournissent des images à l’échelle atomique de la structure des matériaux à des instants précis de la transformation. Une fois ces clichés séquentiels rassemblés, on obtient un film semblable aux anciens folioscopes.
«ÌýNos travaux ouvrent une toute nouvelle perspective sur l’univers microscopique qui, nous l’espérons, nous permettra de répondre aux questions demeurées sans réponse dans le domaine de la physique des matériaux et des particules, mais également de découvrir autant d’aspects encore méconnus. Lorsque vous regardez les choses avec un nouveau regard, vous pouvez voir les choses différemmentÌý», affirme le professeurÌýSiwick.
Ces travaux ont été financés par la Fondation canadienne pour l’innovation, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Programme des chaires de recherche du Canada, et le Fonds de recherche du QuébecÌý‒ÌýNature et technologies.
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A photoinduced metal-like phase of monoclinic VO2 revealed by ultrafast electron diffraction, par VanceÌýR.ÌýMorrison, RobertÌýP.ÌýChatelain, etÌýcoll., Science, leÌý24ÌýoctobreÌý2014.
DOIÌý: 10.1126/science.1253779
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IMAGE:ÌýProf. Siwick tweaking up the laser in his Ã山ǿ¼é lab. CREDIT:ÌýAllen McInnis for Ã山ǿ¼é
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