Quand les parasites deviennent gourmands
Une découverte explique comment le parasite de la leishmaniose « booste » son infection
Une équipe de chercheurs internationaux dirigée par le Dr Martin Olivier, de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé Ã山ǿ¼é (IR-CUSM), a découvert un mécanisme d’action important de la leishmaniose, une maladie parasitaire mortelle transmise par les mouches des sables (ou phlébotomes). La leishmaniose est une maladie qui touche plus de 12 millions de personnes dans le monde, dont 1,3 million de nouveaux cas chaque année. Dans une nouvelle étude publiée aujourd’hui sur le site de Cell Reports, les chercheurs ont décrit comment des molécules clé, connues sous le nom d’exosomes, peuvent activer le mécanisme d’infection du parasite de la leishmaniose chez ses hôtes, tel que l’homme ou d’autres mammifères. Ces résultats pourraient contribuer à l’identification de nouvelles cibles pour l’élaboration de vaccins et de nouveaux outils diagnostiques pour la leishmaniose et d’autres maladies parasitaires.
Des ±¹Ã©²õ¾±³¦³Ü±ô±ðs dans le sang
« Notre étude est une des premières à démontrer qu’un pathogène, tel que le parasite de la  leishmaniose, hébergé par un insecte vecteur peut libérer des ±¹Ã©²õ¾±³¦³Ü±ô±ðs extracellulaires, les exosomes, qui font partie intégrante du cycle de vie infectieux du parasite », affirme le Dr Olivier, auteur principal de l’étude, qui est également chercheur au sein du programme en maladies infectieuses et immunité en santé mondiale de l’IR-CUSM et professeur de médecine à l’Université Ã山ǿ¼é. « Ainsi, des bactéries et des parasites transmis pendant que les insectes se nourrissent de sang pourraient adopter une stratégie similaire pour accroître leur taux d’infection. »
Pendant que l'insecte se régale
Les exosomes sont de petites ±¹Ã©²õ¾±³¦³Ü±ô±ðs dérivées des cellules qu’on trouve dans de nombreux liquides biologiques, y compris le sang, l’urine et la salive. Ils ont fait l’objet de nombreuses études en raison de leur rôle dans la communication intercellulaire particulièrement entre les cellules immunitaires et les cellules tumorales. Si les expériences in vitro ont permis d’établir un vaste corpus de connaissances, l’équipe du Dr Olivier avec des collaborateurs des Instituts américains nationaux de la santé, est la première à faire la description détaillée de leur formation et de leur libération sous forme d’agent infectieux précis dans un organisme vivant.
« À l’aide de la microscopie électronique et de l’analyse protéomique, nous avons découvert que le parasite libérait des exosomes dans l’intestin des phlébotomes femelles, et que pendant que l’insecte se nourrissait de sang, les exosomes et le parasite de la leishmaniose étaient transmis à l’hôte », explique la première auteure de l’étude, la Dre Vanessa Diniz Atayde, chercheuse associée dans le laboratoire du Dr Olivier.
« Nous avons également  découvert en travaillant avec des modèles de souris, qu’une fois le parasite injecté avec ses exosomes, nous étions capables de faire progresser l’infection, ajoute le Dr Olivier. En effet, la réponse inflammatoire, généralement causée par l’infection, ainsi que le nombre de parasites étaient augmentés. »
Une maladie parfois dangereuse
La leishmaniose, qui sévit dans certaines régions tropicales et subtropicales ainsi qu’en Europe méridionale, est transmise par la piqûre de phlébotomes femelles. Lors de la piqûre, les parasites sont injectés dans le sang et ingérés par des cellules immunitaires, dont ils bloquent la fonction, puis se multiplient et se répandent dans d’autres tissus de l’organisme. Cette maladie infectieuse peut se déclarer sous une forme cutanée qui peut généralement être traitée ou sous une forme viscérale plus dangereuse, et peut-être même mortelle. L’Organisation mondiale de la Santé estime que de 20 000 à 30 000 décès sont attribuables chaque année à la leishmaniose dans le monde.
Les effets des changements climatiques
En Amérique du Nord, la leishmaniose est indigène au Mexique et au Texas, mais elle a commencé à étendre son aire de répartition vers le nord. Cette expansion pourrait être facilitée par les changements climatiques, à mesure que de nouveaux habitats deviennent propices aux insectes vecteurs et aux espèces réservoirs de la maladie.
« Cette découverte pourrait ouvrir la voie au développement de nouveaux vaccins qui cibleraient la composition des exosomes et neutraliseraient leur habileté à accroitre l’infection, explique le Dr Olivier. Une autre piste intéressante serait d’étudier les exosomes d’autres insectes qui piquent et qui se nourrissent de sang, tels que les moustiques ou les mouches noires, afin de mettre au point des thérapies antiallergiques pour atténuer l’inflammation cutanée qui se manifeste après une piqûre d’insecte. »
Au sujet de l’étude
Cette étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). L’article, intitulé , peut être consulté en anglais dans le site Web de Cell Reports.