De tout temps, les groupes marginalisĂ©s ont Ă©tĂ© les plus durement touchĂ©s par la maladie et les crises sanitaires, et c’est malheureusement ce qui se passe aussi au temps de la COVID-19. Camille Clement, Ă©tudiante au premier cycle Ă l’UniversitĂ© Ă山ǿĽé, braque les projecteurs sur cette triste rĂ©alitĂ© en suivant la pandĂ©mie en temps rĂ©el et en publiant ses donnĂ©es en ligne.
Camille entamera cet automne la quatrième et dernière annĂ©e de son baccalaurĂ©at en environnement et en dĂ©veloppement avec mineure en informatique. Elle coprĂ©side l’Association des Ă©tudiants en environnement de l’UniversitĂ© Ă山ǿĽé et travaille Ă temps partiel comme assistante de recherche au sein du dirigĂ© par Nancy Ross, professeure de gĂ©ographie et vice-principale adjointe (recherche et innovation) Ă l’UniversitĂ© Ă山ǿĽé.
Une occasion en or
Originaire de Lyon, en France, où elle passe l’été avec sa famille d’ici son retour à Montréal en septembre, Camille s’est jointe à ce groupe de recherche à la fin de sa deuxième année.
En mai dernier, pour une rare fois dans sa vie, elle s’est retrouvée désœuvrée : elle venait de finir ses examens, et les laboratoires de l’Université étaient fermés. La Pre Ross lui a alors fait une offre qu’elle n’a pas pu refuser.
Sur les traces de la pandémie
« Nancy s’interrogeait sur le rôle du revenu comme déterminant social de la COVID, explique Camille. C’était un sujet on ne peut plus pertinent pour notre laboratoire. Nous avons constaté que certains groupes étaient plus touchés que d’autres. »
Nancy Ross qui, par intérêt personnel, suivait l’évolution de la COVID-19 depuis l’arrivée de la maladie au Canada a décidé de mettre les autres membres de l’équipe à contribution pour déterminer s’il y avait un lien entre la COVID-19 et le statut socioéconomique et, le cas échéant, si ce lien était propre à certaines villes.
« On dirait que les gens sur les premiers barreaux de l’échelle sociale dégustent toujours plus que les autres; il semble y avoir là une injustice flagrante. Et voilà qu’avec ce nouveau virus, le scénario attendu se déployait là , devant nos yeux », explique la professeure.
Les rĂŞnes bien en main
Sachant que Camille était disponible et ne demandait qu’à aider, Nancy Ross lui a confié le projet en lui adjoignant comme superviseure et collaboratrice Clara Kaufmann (maîtrise en géographie, 2020), très ferrée en recherche et en analyse.
Camille, la benjamine de l’équipe, avait pour mission d’étudier le lien entre les cas de COVID-19 et le statut socioéconomique dans les divers quartiers de Montréal. Portée par l’enthousiasme, elle a finalement ratissé beaucoup plus large, à savoir l’Amérique du Nord au grand complet. « Je lui ai dit de se laisser aller, et c’est en plein ce qu’elle a fait », lance la Pre Ross dans un éclat de rire. « Camille est une fille brillante, alors elle va largement au-delà des attentes et n’a pas son pareil pour bonifier un projet. »
Clara abonde dans le mĂŞme sens, soulignant que Camille a dirigĂ© ce projet de main de maĂ®tre. « Elle a du cĹ“ur Ă l’ouvrage et ne se contente pas du minimum, dit-elle. Lorsqu’elle est arrivĂ©e dans l’équipe, elle venait tout juste de finir sa deuxième annĂ©e et, dĂ©jĂ , elle avait le goĂ»t de diriger des projets. Ce qui est bien Ă Ă山ǿĽé, c’est que c’est possible pour un Ă©tudiant au premier cycle de prendre la direction de projets de recherche. »
Résultats préliminaires
Les données recueillies à ce jour confirment ce dont Camille et l’équipe se doutaient déjà : les personnes vivant dans un ménage à faible revenu risquent davantage de contracter la COVID-19. C’est le cas dans toutes les villes étudiées, sauf Detroit.
« Le cas de Detroit est sans conteste le plus intéressant, parce qu’il détonne. Il règne là -bas une pauvreté telle que le revenu ne fluctue pas autant d’un quartier à l’autre, fait observer Clara. Mais dans toutes les autres villes, la tendance se dessine très nettement, et cette grande constance est vraiment saisissante. »
Depuis son poste de travail, en France, Camille passe de 20 à 30 heures par semaine à recueillir des données sur des sites en libre accès comme celui de Statistique Canada et des Centres for Disease Control and Protection (CDC) des États-Unis,
« Nous prenons des données accessibles à tous et les présentons sous une forme intéressante, résume Camille. Notre but, c’est de recueillir de l’information qui, nous l’espérons, nous aidera à mieux prévoir ce que nous réserve la COVID-19 si elle reste dans le décor. Nous voulons aider les gens à comprendre ce qui se passe. »
Maintenant, l’équipe entend faire le même travail dans d’autres villes du monde et étudier d’autres déterminants sociaux de la santé, tels que la race, le sexe, l’âge et la profession.
Une chercheuse est née
Comme Camille a pu le constater, la collecte de données n’est pas toujours une sinécure et apporte son lot de contrariétés, surtout lorsqu’elle se fait à distance. Malgré tout, cette expérience lui a permis d’aller chercher les compétences et la confiance nécessaires pour donner libre cours à sa passion pour la recherche.
« Au début, j’étais un peu intimidée par ces chercheurs de haut vol qui avaient tous des publications à leur actif et une carrière bien établie, se remémore-t-elle. Mais j’ai été accueillie à bras ouverts et j’ai tellement appris. L’expérience a été super formatrice et j’ai adoré travailler avec cette équipe. »
De son côté, Clara ne tarit pas d’éloges sur Camille, avec qui elle fait des mises au point et brasse des idées tous les deux jours sur Zoom ou par courriel. « Elle a le don de trouver des angles intéressants et est étonnamment autonome en recherche pour une étudiante au premier cycle. Elle m’impressionne! »
L’autonomie et le dynamisme de Camille ont fait forte impression sur Nancy Ross également. « Elle est tellement curieuse et adore fouiller. C’est une étudiante super intéressée, très bien formée et dotée de solides compétences techniques. Elle nous a donné un sérieux coup de main. »
Forgée pour un avenir prometteur
La recherche passionne Camille à un point tel qu’elle a l’intention d’en faire une carrière à temps plein après l’obtention de son baccalauréat, puis de sa maîtrise et de son doctorat.
« Cette expérience m’a donné une bien meilleure idée de ce que j’avais envie de faire plus tard, affirme-t-elle. Je sais maintenant que j’ai vraiment du plaisir à faire de la recherche, et ça, on ne le sait pas tant qu’on n’a pas mis la main à la pâte. »
L’intérêt de Camille pour la recherche est né lors d’un cours de géographie que donnait la Pre Ross avec un collègue devant 200 personnes. Elle était l’une des plus jeunes étudiantes du groupe, ce qui ne l’a pas empêchée de demander à la Pre Ross s’il y avait une place pour elle dans son laboratoire. Et elle encourage tous les étudiants férus de recherche à l’imiter.
« Ne soyez pas timides. Allez jaser avec vos professeurs et soyez audacieux. Ils sont ouverts d’esprit et recherchent des étudiants qui ont soif d’apprendre. »
Pour suivre les travaux du groupe, dont le projet COVID-19, .